lundi 27 janvier 2014

Ecoute

Ecoute encore sur ma joue
Battre le flux et le reflux
D’un oiseau tiède qui rejoue
Ce qui bientôt ne sera plus.

Vois déjà mourir à mes lèvres
Comme un trop fugitif baiser,
L’heure en porcelaine de Sèvres
Que l’heure qui suit va briser.

Découvre, décèle, devine
Toutes les failles dont mon front
Quelquefois soûl d’une eau divine,
Porte la blessure et l’affront.

Nous ouvrons tous le même livre
Et nous le fermons tous… mais quand ?
Est-il jamais simple de vivre
A compter chaque être manquant ?

C’est moi, c’est toi, c’est nous, personne.
Nos destins se ressemblent tant.
Tant que déchiré j’en frissonne,
Tant que j’en ai le cœur battant.

D’abord poupon jailli des brumes,
La vie étrange a la couleur
De somptueux rêves de plumes
Au nid du jour ensorceleur.

Enfant plus tard, l’aube s’entrouvre.
Les pas conquièrent d’autres cieux,
Et nous réinventons le Louvre
A la lumière de nos yeux.

L’adolescence alors venue,
L’idéal gifle le réel
Sans fatigue, sans retenue
Car notre monde est si cruel !

Puis jetant l’obole ou l’insulte,
Ou fraternel, ou vil et dur,
Apparaît enfin l’homme adulte
Dans son habit en clair-obscur.

Après ? Faut-il que je le dise ?
La vieillesse au bout du chemin
A laquelle avec gourmandise
La mort vorace tend la main…

Mais écoute là sur ma joue
Aux sons de l’espoir entêté,
Une promesse qui rejoue
Un air nouveau d’éternité.

- Poème de Thierry Cabot, extrait de La Blessure des mots

Aucun commentaire:

Publier un commentaire

Pour que le commentaire soit publié, inscrivez-le dans l'espace réservé.